Dimension clé de la cure analytique, le transfert est la réactivation de pulsions inconscientes infantiles insues, qui sont adressées à la personne de l’analyste. Dans ce processus, référent, canal, destinataire et même code sont tous sujets à des déplacements, transpositions ou substitutions : le transfert est à la fois dé- et re-contextualisation, réactualisation temporelle ; l’analyste et son cabinet deviennent acteur et théâtre, la cure le medium dans lequel l’analysant s’exprime. Découverte accidentellement par Freud dans la cure de Dora, cette situation où l’on répète en transposant pourrait servir de modèle théorique au processus créatif à l’œuvre dans la littérature, le cinéma ou dans le contexte des « media studies ». Peut-on envisager que cette double impulsion, à redire et à répéter sous une forme autre ou insue, à faire glisser codes et modalités, soit au cœur de l’acte d’écriture ou de création artistique ? Par quels jeux de substitutions, déplacements, et métonymies un medium fonctionne-t-il ?

Toujours présent inconsciemment dès l’établissement du rapport entre analyste et analysant, le transfert peut être l’occasion de résistance, de conflit. Dans quelle mesure l’écriture ou la création artistique mettent-elles en œuvre des processus comparables aux processus transférentiels ? Quels malaises et forces appellent à la répétition et la remise en jeu ? Si le transfert est un moment-seuil, peut-il être franchi et dépassé, et quel est son devenir ? On pourrait questionner en particulier le rapport entre trauma et transfert.

— Numéro coordonné par Isabelle Alfandary, Priyanka Deshmukh et Samuel Weber

Publiée: 2023-03-17