Touche/échappe : émouvoir, d'après T. S. Eliot
Mots-clés :
Eliot, T.S., Modernisme, Impersonnalité, ReprésentationRésumé
La question des émotions, celles du poète et celles du lecteur, est intimement liée, dans la poétique de T. S. Eliot, à la notion d’impersonnalité théorisée notamment dans son essai « Tradition and the Individual Talent ». Le processus de création poétique viserait à « laver » le poème de toute émotion personnelle en retravaillant les émotions premières en tant que matériaux poétiques, afin de susciter chez le lecteur des émotions propres à l’œuvre elle-même. La méfiance vis-à-vis de l’émotion dans son rapport à la représentation depuis Platon, les éventuelles réticences à l’égard d’un lyrisme par trop personnel, ont souvent incité le critique à interroger la pertinence de l’émotion comme composante de la lecture et comme outil herméneutique. La théorie éliotienne de l’impersonnalité de l’ « émotion de l’art » nous invite à « situer » la naissance du mouvement de l’é-mouvoir ailleurs que dans un référent extérieur à l’œuvre ou une quelconque origine de l’énonciation. Le recours fréquent au drame dans les essais d’Eliot lorsque celui-ci tente d’appréhender l’émotion nous invite à interroger le lien entre action dramatique et action poétique, entre scène dramatique et scène d’écriture, comme moteurs et lieux d’émergence de l’émotion artistique. Mettant ainsi l’accent sur l’action et sur le mouvement, nous tenterons de définir la nature de ce(s) mouvement(s) du poète au poème, du poème au lecteur, du lecteur au poème, mouvement(s) complexe(s) de cet émouvoir que l’article se propose d’appréhender à la lumière des écrits théoriques de T. S. Eliot.
Hit and miss: T.S. Eliot on Emotion
In T. S. Eliot’s poetics, the question of emotions – the poet’s and the reader’s – is closely related to the notion of impersonality theorized in his essay “Tradition and the Individual Talent”. Poetic creation is seen as a process which removes all traces of personal emotion from the poem by “working them up into poetry”, in order to create new emotions born of the poem itself, emotions that will, in turn, affect the reader. The history of distrust that surrounds emotion and representation, starting with Plato, the reluctance to embrace or accept excessively personal forms of lyricism, have often led critics to question the relevance of emotion as a component of the reading process and as a hermeneutic tool. Eliot’s theory of the impersonality of the “emotion of art” urges us to “locate” the birth of the movement of é-mouvoir (moving) not in any referent outside the poem, nor in any origin of enunciation, but elsewhere. The fact that Eliot often refers to drama in his essays when dealing with emotion, invites us to question the link between dramatic action and poetic action, between the scene/stage of drama and the scene/stage of writing, as causes and matrixes of artistic emotion. Focussing on action and movement, we will try to define the nature of the motion(s) from poet to poem, from poem to reader, from reader to poem, the complex motion(s) of the “émouvoir” that this article sets out to apprehend in the light of T. S. Eliot’s theoretical writings.
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