Christelle Klein-Scholz
Aix-Marseille Université, LERMA (EA 853)
By the time you read these words I may in all likelihood be dead1.
La littérature gay du SIDA telle qu'elle est apparue aux débuts de l'épidémie se prête particulièrement bien à une réflexion sur la survivance vu qu'elle a pour postulat quasi systématique la mort de l'auteur ; non seulement sa mort prochaine, à d'autant plus court terme qu'il s'agit d’œuvres écrites et publiées longtemps avant le développement des traitements antirétroviraux en 1996, mais également l'extinction éventuelle de sa communauté, de son mode de vie, voire de sa littérature. Rappelons le ton eschatologique de l'article séminal de Larry Kramer, « 1,112 and Counting », publié en 1983 dans le New York Native :
If this article doesn't scare the shit out of you, we're in real trouble. If this article doesn't rouse you to anger, fury, rage, and action, gay men have no future on this earth. Our continued existence as gay men upon the face of this earth is at stake2.
Pourtant, en 1990, Michael Callen publie Surviving AIDS : il s'adresse à ceux qu'il nomme les « long-time survivors » du SIDA, catégorie qu'il crée lui-même dans le but avoué de la faire exister, persuadé qu'il est du poids des mots dans la possibilité même de survivre : « Whatever its source, the endless repetition of the lie that everyone dies from AIDS denies the reality of — but perhaps just as important, the possibility of — survival3. » Son décès trois ans plus tard, à l'âge de trente-huit ans, semble rendre la question de la survie (au sens propre, le fait de rester en vie dans un environnement mortifère) sinon nulle et non avenue, au moins toujours provisoire. En revanche, la question de la survivance — maintien du souvenir de l'auteur et de son œuvre, après sa mort, dans la mémoire d'une communauté — amène à envisager le temps long, et surtout à remettre en question l'idée fort répandue, pratiquement devenue un cliché, selon laquelle il y a, dans la communauté gay, et, partant, dans la littérature gay, un « avant » et un « après » SIDA ; l'irruption du SIDA aurait créé une césure irréversible. Pourtant, ce point de non-retour, si l'on ne peut pas en contester l'existence, demande à être relativisé et nuancé : la littérature gay, ses personnages et ses auteurs ne sont pas méconnaissables face au SIDA ; le changement n'est pas si radical qu'il pourrait paraître. En s'appuyant sur l'œuvre de David Feinberg — ses deux romans, Eighty-Sixed et Spontaneous Combustion, et son recueil d'essais Queer and Loathing — et sur les huit tomes des Tales of the City d'Armistead Maupin, il est possible de poser la question de la survivance à plusieurs niveaux. Tout d'abord, le septième tome des Tales of the City est intitulé Michael Tolliver Lives : séropositif depuis le cinquième tome, Michael est toujours là. C'est la technique narrative de Maupin que les lecteurs n'ont pas reconnue, puisqu'il est passé d'une mosaïque de personnages à un personnage central et d'un récit à la troisième personne à une histoire racontée par Michael lui-même à la première personne. La capacité de Michael à survivre contre toute attente, celle des Tales of the City à renaître des cendres des années quatre-vingt, celle de San Francisco en général et du Castro en particulier à être toujours le théâtre des aventures de ses habitants pittoresques malgré l'hécatombe du SIDA — autant de marques du sursis que leur a accordé Maupin et qui amènent à se demander : que reste-t-il de l'« avant » dans l'« après » ? Que reste-t-il des années quatre-vingt dans les années 2000 ? De l'exubérance des personnages des six premiers tomes dans les deux derniers ? De l'écriture de Maupin, qui semble si différente ? D'autre part, la question de la survivance prend une autre dimension quand elle est posée au sujet de David Feinberg, puisqu'elle ne peut pas se superposer à celle de la survie, l'auteur étant décédé des suites du SIDA en 1994 à l'âge de trente-huit ans. Il est à noter que Feinberg a d'abord publié deux romans autofictionnels, dont le personnage principal, B.J. Rosenthal, était assez transparent pour laisser voir la ressemblance frappante avec l'auteur, avant de laisser tomber le masque et, à la toute fin de sa vie, de passer à l'autobiographie, à l'approche de la mort. De plus, Feinberg, écrivain compulsif, presque obsessionnel, écrivait encore sur son lit de mort, et travaillait même sur de nouveaux ouvrages lors de son ultime séjour à l'hôpital, comme le raconte en 2006, plus de vingt ans plus tard, son ami John Weir dans What I Did Wrong — mais lui aussi passe par la fiction : si les lecteurs de Feinberg le reconnaissent sans l'ombre d'un doute sous les traits du personnage de Zack, Weir ne donne pas directement la clé de cette renaissance littéraire. Les questions qui se posent sont alors les suivantes : pourquoi Feinberg a-t-il mis à profit son « supplément de vie » pour tant écrire, écrire sa vie, et sa mort ? Comment s'articulent mort de l'auteur et survie du texte ? De Feinberg à Weir, quelles liaisons entretiennent fiction et (auto)biographie quand l'enjeu est la mort ?
Contre toute attente (voir la citation en tout début d'article), David Feinberg était encore en vie quand Eighty-Sixed et Spontaneous Combustion ont été publiés, respectivement en 1989 et 1991. Il se savait cependant séropositif depuis deux ans, et avait enterré assez d'amis pour se faire peu d'illusions sur ce qui l'attendait :
I had heard it takes two years to complete the healing process and fully recover from the death of a close friend. Yet everyone was dying. There was no time left to cope. Were the two-year sentences of grief run currently or consecutively? Was there time off for good behavior? Whenever I got hopeful, whenever I emerged from the blanket of despair, whenever I was about to regain my mental balance, someone died; someone stuck a pin into my shiny balloon and popped it4.
Une brochure datée de 1986 et signée de la main du « Surgeon General of the United States » C. Everett Koop, nous amène même à reformuler : la mort est non seulement ce qui l'attend, mais également ce qu'on attend de lui :
The number of persons known to have AIDS in the United States to date is over 25,000; of these, about half have died of the disease. Since there is no cure, the others are expected to also eventually die of their disease5.
Tout l'enjeu de la survie des personnes infectées, car il s'agit bien ici de survie et non encore de survivance, se trouve dans le sursis qui leur est accordé par l'utilisation de l'adverbe « eventually »6. A bien y réfléchir, rien de nouveau sous le soleil : « Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure » (Matthieu 25:13). Mors certa, hora incerta, c'est notre lot à tous, et donc celui de tous les auteurs, qui seront peut-être lus après leur mort. Pour Feinberg, et pour tous ses compagnons d'infortune, la différence n'est pas uniquement l'imminence de la mort (hora incerta, certes, mais l'AZT et les traitements prophylactiques des infections opportunistes avaient une efficacité limitée, et surtout limitée dans le temps7), mais son omniprésence, telle qu'elle oblitère la frontière entre les vivants et les morts :
“If only they came out with the safe-sex regulations two months earlier, I'd still be alive.”
“You are alive, Benjamin.”
“You know what I mean.8”
Benjamin, l'alter ego fictionnel de Feinberg dans Eighty-Sixed et Spontaneous Combustion, n'est pas mort, mais d'une certaine façon il l'est déjà, puisque l'hécatombe qui décime la communauté gay dans les grandes métropoles américaines, en l'occurrence New York, semble donner une dimension rétroactive à la mort. Le temps s'inverse, la pendule s'arrête sur l'heure du diagnostic ; le reste, le sursis, n'est qu'attente : « Most people thought you got this thing and died. In truth, you got this thing and waited9. » Le rapport au temps est bousculé, mais pas aussi radicalement que dans l'imaginaire collectif, où le SIDA des premières années était une maladie foudroyante ; l'une des caractéristiques du VIH est d'être un lentivirus, qui comme son nom l'indique agit lentement, même en l'absence de traitement. C'est dans ces quelques mois, voire ces quelques années, entre le diagnostic et le décès, une fois que l'auteur sait que sa survie n'est que provisoire, que se situe tout l'enjeu de la survivance, pour Feinberg par l'écriture : « We're living in AIDS time. We're living in dog years. […] [E]verything […] is a waste of time: […] writing this piece. I take minor solace that it may eventually end up in my posthumous collection of random pieces, Life in Hell10. » Quand la mort est partout, perdre son temps à écrire, « a hopelessly bourgeois act, an act of vanity11 » n'a de sens que si l'on regarde de l'autre côté du miroir.
Ce VIH, que Kushner baptise « the virus of time12 », est donc bien le virus du temps ductile, qui laisse quelques mois à ses hôtes pour écrire en vue de « l'après », mais qui dans le même temps brouille la frontière entre « l'avant » et « l'après ». Il est une autre césure qui mérite d'être déconstruite : celle, pourtant très généralement admise, qui fait du SIDA une solution de continuité dans l'histoire et la littérature gaies, un changement si radical qu'on parle également d'un « avant » et d'un « après ». Le premier roman de Feinberg est séparé en deux parties chronologiques : « 1980: Ancient History » et « 1986: Learning How to Cry ». Ces deux parties sont décrites, un peu facilement, dès la sortie de Eighty-Sixed, comme radicalement opposées :
In a structure calling to mind those “before and after” photographs advertising a cure for baldness, a nose job or a miracle diet (although in this case the “after” photo looks much worse than the “before”), Eighty-Sixed contrasts the heyday of the hip and loose gay life style at the beginning of this decade and the anxiety and sense of doom permeating a community half destroyed by AIDS just a few years later13.
Nicolas Balutet abonde dans le sens de cette notion de césure : « Le sida est […] le signe d'une entrée dans cette ère du désenchantement qui marque une rupture avec les années de l'immédiat après 68, leur prospérité sauvage, leurs libertés vécues à corps perdu, leur somme d'illusions défaites sur fond d'idéologie en berne14 ». « Contraste » et « rupture » sont les maîtres-mots des exégètes de la littérature du SIDA ; nous allons voir qu'ils sont à nuancer, que, dans le cadre d'une réflexion sur la survivance, certaines caractéristiques définitoires des années 70 ont perduré, contre toute attente, et ont survécu à la crise du SIDA des années 80. Cependant, il est un domaine où le contraste est effectivement saisissant : le lexique. Les auteurs gays des années 70 se délectaient à jouer avec les mots, par exemple en reprenant à leur compte les insultes homophobes afin de se les approprier (le roman de 1978 de Larry Kramer s'intitule Faggots). Même après l'irruption du SIDA, Feinberg joue avec les mots, par exemple dans son titre Queer and Loathing: Rants and Raves of a Raging AIDS Clone, clin d’œil à Fear and Loathing in Las Vegas: A Savage Journey to the Heart of the American Dream de Hunter S. Thompson. Mais quand il s'agit de parler de SIDA, et notamment d'annoncer le diagnostic, les mots manquent. Là où il s'agit de dire la maladie, le texte est béant :
Feinberg: “I’m starting on medical disability tomorrow.” We knew that it could be only one thing. Words were not necessary in this day and age15.
Maupin: Thack paused. “Have you thought about taking the test?”
“I've taken it,” said Michael.
Thack looked at him.
Michael managed a rueful smile. “I was not amused.”16
« Les Allemands disent joliment, pour “mourir”, die Feder aus der Hand legen, “lâcher, laisser tomber la plume de sa main”17 . » S'ils continuent à écrire, et même à jouer avec les mots, la plume des auteurs du SIDA contourne ceux de la mort à venir.
Le SIDA est donc bien un point de non-retour dans ce domaine de la littérature gay ; cependant, cette dernière n'est pas si méconnaissable que beaucoup le disent. Pour étayer cette idée, l'œuvre d'Armistead Maupin est intéressante à examiner à plusieurs titres : d'une part, Maupin a commencé à écrire ses Tales of the City au milieu des années 70 et en a publié le dernier tome en date en 2010, ce qui permet de voir l'évolution de son écriture et de constater les changements et les persistances, d'examiner les photos « avant » et « après », et même longtemps « après ». D'autre part, Armistead Maupin est séronégatif, alors que l'un des personnages principaux des Tales, Michael Tolliver, est séropositif depuis le cinquième tome ; il ne s'agit donc pas de mort imminente de l'auteur, mais de mort éventuelle du personnage. Et c'est ici qu'il est très intéressant de se pencher sur l'histoire des Tales : les trois premiers tomes ont été respectivement publiés en 1978, 1980 et 1982 ; le quatrième date de 1984, c'est celui où l'on apprend qu'entre temps, le compagnon de Michael, Jon, est mort des suites du SIDA, et ce récit est souvent décrit comme étant la première œuvre de fiction incluant le SIDA ; le cinquième tome a été publié en 1987, on y apprend la séropositivité de Michael ; dans les dernières pages du sixième tome, en 1989, Michael découvre sa première lésion cutanée due au sarcome de Kaposi, et même si le tome se termine sans qu'il n'ait les résultats définitifs de la biopsie, un lecteur quelque peu averti sait qu'à l'époque cela indiquait que ses chances de survie étaient minces. Commencent à ce moment les dix-huit ans d'attente qui désoleront tant de lecteurs des Tales, dix-huit ans pendant lesquels il y a fort à parier que les lecteurs de Maupin se faisaient peu d'illusions d'une part sur la publication d'un éventuel septième tome, d'autre part sur le sort de Michael si Maupin faisait bel et bien un jour revivre son petit théâtre du 28 Barbary Lane. Klaus Nomi en 1983, Rock Hudson en 1985, puis Ryan White en 1990, Freddie Mercury en 1991, Anthony Perkins en 1992, Arthur Ashe en 1993 — tous avaient fait les gros titres, si bien que même les lecteurs de best-sellers ne pouvaient qu'avoir du mal à imaginer que Michael passerait entre les gouttes18.
Et pourtant, en 2007, paraît Michael Tolliver Lives, dont le titre même est loin d'être anodin : dès la couverture, voire dès l'annonce de la publication prochaine de ce roman, les lecteurs savaient qu'ils n'avaient pas attendu presque deux décennies pour apprendre que Michael était décédé. Celui-ci a survécu à la crise du SIDA, mais il ne s'agit pas de « Michael Tolliver survives », mais bien « lives » ; ni chant du cygne, ni baroud d'honneur, simplement une vie qui continue, et qui continuera en 2010 avec Mary Ann in Autumn19. A bien des égards, le Michael de 2007 est assez fidèle à lui-même ; s'il fallait démontrer de manière exhaustive qu'il est loin d'être méconnaissable, la liste des points communs entre le Michael des premiers tomes et celui du septième tome serait longue. Pour n'en donner que les éléments principaux, Michael est toujours aussi critique et sarcastique vis-à-vis de l'Amérique mainstream, aussi curieux et sceptique face aux évolutions de la société20, il vit toujours à San Francisco, qu'il décrit comme étant toujours un « village21 » avec ses propres us et coutumes, au sein duquel le Castro mérite toujours son petit surnom de « Gayberry ». La question de sa survie trouve une réponse en deux phrases : « But then I didn’t die. The new drug cocktail came along, and I got better22 ». Le ton de ce septième tome n'a très vraisemblablement pas non plus décontenancé les lecteurs, puisqu'il ressemble trait pour trait à celui des six premiers tomes : tout au long des Tales, c'est le propre de Maupin que d'osciller régulièrement entre légèreté et gravité ; à titre d'exemple, Further Tales of the City s'ouvre sur les préparatifs d'une fête d'anniversaire tout à fait typique du 28 Barbary Lane, où la marijuana « maison » d'Anna Madrigal et les taquineries concernant l'âge de Mary Ann, dernière de la petite troupe à passer le cap des trente ans, assurent une ambiance bon enfant que l'auteur excelle à dépeindre par petites touches :
Michael relinquished the cat and presented the check to Mrs. Madrigal. “I'm sorry it's so late. Again.”
She waved it away with her hand, hastily tucking the check into a half-read volume of Eudora Welty stories. She found it excruciating to discuss money with her children. “Well,” she said, “what shall we do about Mary Ann's birthday?”
“God,” winced Michael. “Is it that time already?”
Mrs. Madrigal smiled. “Next Tuesday, by my calculations.”
“She'll be thirty, won't she?” Michael's eyes danced diabolically.
“I don't think that should be our emphasis, dear.”
“Well don't expect any mercy from me,” said Michael. “She put me through hell last year on my thirtieth. Besides, she's the last one in the house to cross The Great Divide. It's only proper that we mark the event.”
Mrs. Madrigal shot him her Naughty Boy look and sank into the armchair by the hearth. Sensing another chance to be picturesque, Boris [the cat] dove into her lap and blinked languidly at the fire. “Can I interest you in a joint?” asked the landlady23.
Avec un tel incipit, comment s'attendre au déferlement de violence homophobe dont sera victime Michael quelque trois cents pages plus loin ? Dans la rue un soir, Brian et lui-même sont pris à parti à coups de « Hey faggots! You a couple of cocksuckers? », passés à tabac avec acharnement :
The first one went straight for Michael, kicking him squarely in the groin […] then slammed his head back down against the pavement. The noise this time was muffled, liquid. […] When Michael saw the sudden flash of steel, he screamed in disbelief. […] But the knife came down again and again24.
Aux yeux du lecteur, ils sont laissés pour morts. Maupin attendra quatre chapitres pour faire redescendre la tension, grâce à Mary Ann qui va voir les deux blessés à l'hôpital et apprend que leurs jours ne sont pas en danger. Cette alternance entre tranches de vie pittoresques et moments sombres est un trait distinctif des Tales ; c'est la stratégie même de Maupin : « The abrupt violence in this once-lighthearted novel reads much more dangerous — and true — because we've been fooled into going along with what seemed to be a joke. Maupin is a mask-wearer, like many of his actors25. » Et il n'en change pas dans Michael Tolliver Lives. Dès la première page, il est rappelé au lecteur que les décennies écoulées ont épargné peu d'habitants du Castro, que les survivants sont des exceptions :
Here in our beloved Gayberry you can barely turn around without gazing into the strangely familiar features of someone long believed dead. Having lost track of him in darker days, you had all but composed his obituary and scattered his ashes at sea, when he shows up in the housewares aisle at Cala Foods to tell you he’s been growing roses in Petaluma for the past decade .
C'est sur cette note grave que Maupin reprend la plume, mais à peine quelques pages plus loin, lors de la rencontre entre Michael et celui qui deviendra son compagnon, Ben, on reconnaît immanquablement la légèreté de ton :
“You should know,” I said, releasing him. “I’m positive.”
[Ben] looked me in the eyes and smiled. “About what?”
“Don’t get smart with your elders,” I said, leading the way to the bedroom. [...]
“I couldn’t tell if you were queer from up [on the roof].”
I gave him a puzzled frown: “How high is that roof, anyway?”26
Mais alors, quid de la rupture radicale induite par le SIDA ? Elle n'est certainement pas frappante en ce qui concerne la diégèse et le ton ; mais elle fut particulièrement déroutante pour les lecteurs de 2007, dont beaucoup furent très déçus de découvrir que si les personnages étaient peu ou prou les mêmes, si la voix de Maupin était tout à fait reconnaissable, le médium, lui, avait changé : la technique narrative de Maupin, ce récit en mosaïque à la troisième personne où il passe d'un personnage à l'autre de paragraphe en paragraphe, qui avait probablement grandement contribué à son succès et qui allait si bien avec la forme sérielle des débuts des Tales27, n'est plus. Dans Michael Tolliver Lives, c'est Michael qui parle, à la première personne ; de personnage certes privilégié de l'auteur et « chouchou » des lecteurs mais partageant la vedette avec Mary Ann, Anna et Brian, pour ne citer qu'eux, il passe à narrateur, et donc à « héros », alors que c'était bien l'une des caractéristiques définitoires des Tales de n'en avoir aucun, d'être une succession de tranches de vies ordinaires. Mais pouvait-il en être autrement ? Ce passage d'une focalisation multiple à un récit à la première personne a bel et bien pour but de faire de Michael le héros des Tales, et ainsi d'en faire un héros tout court :
That's really the reason I got back into the story […]: the realisation that a lot of people had been around for these 20 years, surviving, not in an easy way because the meds that deal with HIV are quite debilitating, but they have been surviving. They survived the homophobia of their youth and they survived a plague that was laid at their doorstep even when they were as ignorant as everyone else about what caused it or where it came from, and I wanted to celebrate those guys, I wanted to say bravo, you're heroes in my book, and this was my way of doing that28.
Il semble que si Michael pouvait survivre, si San Francisco pouvait rester debout, c'est le texte lui-même qui devait porter les scories de la crise du SIDA. Que reste-t-il des années 70 dans les années 2000 ? Tout, sauf le principal : le regard porté sur le monde, la conscience à travers laquelle le lecteur accède à l'histoire des personnages.
Il est intéressant de noter que cette « héroïsation » de Michael n'est pas que littéraire : le jour de la sortie de Michael Tolliver Lives a été officiellement baptisé « Michael Tolliver Day in San Francisco29 ». Tout va dans le sens d'une tentative d'hagiographie, ou du moins d'inscription presque forcée du statut de héros, de survivant, de Michael dans l'histoire des Tales, ainsi que dans l'Histoire de San Francisco et, partant, des gays. Mais n'est-ce pas là une manière tout à fait usuelle d'inscrire un événement, un personnage dans la mémoire collective ? Célébrer sa survie en lui accordant un jour de l'année est l'équivalent de la célébration annuelle des émeutes de Stonewall, qui a fini par faire de Stonewall, dans toutes les mémoires, l'événement séminal du mouvement de libération gay :
The claim of Stonewall as movement origin is now ingrained on a plaque outside the Stonewall bar in New York, repeated in newspapers, embedded in history books, and mythologized in documentaries. What many people assume to be a basic fact about the gay movement that it started with Stonewall is a story that the movement successfully promoted30.
Ce qui reste de l' « avant » dans l'« après », c'est un personnage de fiction qui a survécu et auquel l'auteur et les lecteurs ont conféré un statut officiel de survivant qui est une synecdoque de la « sweet confederacy of survivors »31 de la crise du SIDA, bien réelle celle-ci. Il est également intéressant de remarquer que seul ce septième tome « hagiographique » a vu un changement dans la technique narrative de Maupin ; pour le tome suivant, Mary Ann in Autumn, l'écrivain est revenu à ses premières amours, un narrateur omniscient qui passe de personnage en personnage et d'histoire en histoire ; et, aussi surprenant que cela puisse paraître, c'est le cancer de Mary Ann, et non le SIDA de Michael, qui est au cœur de la trame narrative. Si la mort de Michael est toujours thématisée, c'est, tout simplement, parce qu'à force de survivre, il vieillit : « And here’s the kicker: the longer you survive, the closer you get to dying the regular way32. » L'emploi de l'adjectif « regular » est important : mourir du SIDA est une anomalie, tous les morts du SIDA furent des anormalités ; il fallait donc bien un tome des Tales qui soit une irrégularité dans la série pour traiter l'aberration que fut la crise du SIDA — à travers la voix d'un survivant qui parle pour toutes celles qui se sont tues.
Posée à propos de David Feinberg, la question de la survivance prend ici une autre dimension, puisqu'elle ne peut pas se confondre avec celle de la survie : l'écrivain fait partie des nombreuses victimes des premières années de l'épidémie. Feinberg, qui a appris sa séropositivité en 1987, a d'abord publié deux romans, Eighty-Sixed en 1989 et Spontaneous Combustion en 1991. Le personnage principal, B.J. Rosenthal, est assez transparent pour laisser voir sa ressemblance frappante avec l'auteur ; Feinberg lui-même atteste ce caractère autofictionnel dans la préface de sa troisième et dernière œuvre Queer and Loathing : « In Eighty-Sixed and Spontaneous Combustion I filtered my experience through a fictional persona, B.J. Rosenthal. This mask allowed me to selectively reshape my past. Yet I found that the more I wrote, the fewer alterations of fact I made33. » Dans ce troisième opus, l'auteur laisse donc tomber le masque et passe de l'autofiction à l'autobiographie, et ceci à la toute fin de sa vie, à l'approche de la mort. Une question se pose : savait-il sa mort si imminente ? A force d'être conscient, et convaincu, qu'il allait bientôt mourir34, n'a-t-il pas cru, ne serait-ce qu'un instant, qu'à l'instar de Michael Tolliver, il survivrait ? Si dans l'appendice de Spontaneous Combustion, intitulé « After the Cure », Feinberg se projette dans l'« après », le ton employé montre que Feinberg se prend à rêver à un avenir post-SIDA dont il ferait partie — mais à rêver seulement ; il crée un monde utopique auquel il ne fait même pas semblant de croire. Il y a cependant un passage dans Queer and Loathing qui amène le lecteur à se rendre compte qu'en dépit de sa lucidité et de son cynisme extrêmes, Feinberg voulait, au moins par moments, défier la mort, croire qu'elle n'arriverait pas si vite : « Keep the date November 25, 1996, open. I am still planning on having that fortieth-birthday, come hell or high water »35. Il est facile de dire que pour les auteurs des années 1980 atteints eux-même du SIDA la mort est un postulat, de regarder les statistiques et les tentatives de traitements de l'époque et de dire qu'évidemment ils savaient, que Feinberg ne pouvait pas ne pas savoir ou ne pas y croire ; pourtant Feinberg espérait un sursis, et celui-ci a été deux ans plus court que ce qu'il souhaitait. Et ce bref sursis, Feinberg l'a mis à profit pour écrire, et écrire beaucoup, puisque dans les derniers mois de sa vie il travaillait sur un ouvrage racontant l'histoire de sa famille, un nouveau roman et une pièce de théâtre, qu'il n'a pas eu le temps de finir36.
La question à soulever est : pourquoi choisir de mettre à profit son supplément de vie pour écrire ? Il n'est ni le premier ni le seul à propos duquel cette question mérite d'être posée : un an avant Eighty-Sixed, Borrowed Time de Paul Monette raconte la vie et la mort du compagnon de l'auteur, lui-même atteint du SIDA, et c'est dès la première ligne qu'il fait comprendre au lecteur qu'il est, lui aussi, en sursis : « I don't know if I will live to finish this37 ». Mais si la situation dans laquelle Monette se trouve lorsqu'il écrit est comparable à celle de Feinberg, le mode d'écriture est radicalement différent : c'est sur le mode élégiaque que Monette écrit, certes avant sa propre mort, mais surtout après la mort de Roger, son compagnon, auquel il consacre d'ailleurs en 1989 un recueil de poèmes intitulé Love Alone: Eighteen Elegies for Rog. C'est le sens de l'épigraphe de Borrowed Time, une citation de Pindare : « Unsung the noblest deed will die ». Il s'agit d'un chant de mort, d'un roman au lyrisme indéniable dont Roger est le héros, et non pas l'auteur lui-même. L'épigraphe d'Eighty-Sixed est en ce sens tout à fait intéressante : « What I claim is to live to the full the contradiction of my time, which may well make sarcasm the condition of truth ». Cet extrait de Mythologies de Roland Barthes donne immédiatement le ton du roman. Ce n'est pas pour exprimer sa douleur que Feinberg écrit, mais pour dire la vérité sur la contradiction de son temps, et pour ce faire il fera grand usage du mode sarcastique. Or il est un autre auteur que l'on associe systématiquement au SIDA et au sarcasme : Larry Kramer, dont la citation de « 1,112 and counting » donnée plus haut n'est qu'un mince échantillon du ton mordant et agressif qu'il utilise dans ses articles et dans ses pièces de théâtre. Mais, ici encore, ce qui le différencie de Feinberg est fondamental : s'il a pu croire, lui dont le diagnostic date de 1988, qu'il ne lui restait pas non plus beaucoup de temps, son acte d'écriture à lui a un but très précis, tout à fait pragmatique : il n'est plus à démontrer que Kramer est un militant dans l'âme, qui écrit pour éveiller les consciences. Reports from the Holocaust, dont la première publication sous forme de recueil d'extraits divers date de 1989, a pour but avoué d'attirer l'attention des médias, des pouvoirs publics et de la population générale sur l'ampleur de la crise du SIDA et de mettre un terme à l'indifférence et à l'inaction. Au contraire, en ce qui concerne Feinberg, la question du « pourquoi » n'admet pas de réponse courte.
Feinberg raconte une anecdote pour y apporter un premier élément d'explication : « Anthony Burgess, who, when falsely diagnosed with brain cancer, wrote five books in a single year in an attempt to support his soon-to-be widow38. » Mais a priori il n'avait ni compagnon ni héritier sans le sou en 1994, c'est pourquoi il s'empresse de saper avec humour cette explication : « It took me practically four months to write a will, and it's not as if I own anything. I'm sure I'll never commit suicide, because it would take me too long to write the proper note39. » Ce n'est donc pas dans l'urgence qu'il écrit. C'est son SIDA qu'il écrit, parce qu'il n'a pas le choix : « I will continue to write about AIDS as long as I am able to because, in a sense, there really is no other topic »40. Ou peut-être est-ce son SIDA qui l'écrit ? « If the virus itself hasn't yet passed the blood-brain barrier, the idea of the virus has already poisoned my mind41. » Quoi qu'il en soit, son moteur, c'est l'humour ; c'est en creux qu'il l'explique en conclusion de Queer and Loathing, puisqu'il décide de mettre le point final à son recueil d'essais dès lors que l'humour vient à manquer :
I could continue in this vein indefinitely. Future episodes could include: Davey gets a cane. Davey gets a Hickman catheter42 and matching bag and shoes. Davey goes blind. Davey loses all control of his limbs. Davey goes on total parenteral nutrition. Davey gets a walker. Davey gets his oxygen tube entangled with the telephone wire. Davey complains about not being able to wear a simple shift over the catheter and tubes. Davey develops Tourette's syndrome. Davey finds religion. Davey becomes even more bitter than before.
But there comes a point when your sense of humor grows stale. It's time for a break. Writing these essays becomes too much of a strain. I've lost my taste for it. I can only mask so much bitterness and anger with humor. The subject ceases to be palatable. It all gets too ugly. (273)
Un autre hiatus de deux décennies commence ici : Feinberg a laissé tomber la plume de sa main en 1994, et c'est son ami John Weir (à qui sont dédiés Spontaneous Combustion et Queer and Loathing) qui la reprend en 2006 avec What I Did Wrong, un roman dont l'épigraphe donne une clé cruciale au lecteur : « And, as I promised, for Dave— sorry it took a while ». C'est la seule allusion directe à David Feinberg ; et pourtant, quiconque a lu les trois œuvres de David Feinberg n'a aucun mal à reconnaître David sous les traits de Zack, personnage fictif qui, pour ne donner que quelques exemples, est écrivain, a publié deux romans et, en 1994, est en train de travailler sur le troisième43, est diplômé du MIT44, vit à Hell's Kitchen, qu'il surnomme « Hell's Kitchenette 45» — la liste pourrait continuer, et on pourrait surtout y faire figurer les nombreux traits de personnalité que partagent David et Zack, et bien évidemment le décès de Zack des suites du SIDA ; aucun doute possible. Mais le personnage de John Weir s'appelle Zack et What I Did Wrong est un roman ; Weir a choisi la fiction pour raconter la fin de vie de son ami, qui n'est d'ailleurs qu'une des trames narratives du roman, et non la principale. Comment interpréter ce choix de la fiction là où Feinberg l'avait laissée tomber ? Voici ce qu'en dit John Weir :
I used to believe with sentimental assurance that I would be able to "capture" — weird word — the essence of Zack. I started writing about him long before he died, rehearsing my account of his death. But his actual dying was so painful it ruined my plot, and I had nothing believable to report. So much for my immortalizing the beloved. I figured if I wrote about him honestly enough, even scathingly enough, I could preserve him. His infected body would be replaced by the body of the book. He’d be alive now, he’d be this, you’d be turning him in your palm46.
C'est l'échec de l'écriture de la mort de l'autre qui expliquerait le passage par la fiction ; parce que la mort en elle-même est indicible, parce qu'on ne peut pas « capturer » la mort, on ne peut que gloser. C'est ce que dit Michel Vovelle dans Mourir autrefois :
[L]e roman livre une information plus sophistiquée, et somme toute plus ambiguë : car les morts qui en scandent le rythme sont à la fois description, et reflet du paysage d’âme d’une époque, en même temps que, déjà, un discours sur la mort47.
What I Did Wrong n'est pas l'histoire de la mort de Zack / David, mais son récit, car dire la mort est toujours aussi problématique :
“He died this afternoon,” she told me, “in the emergency room. We took him there [...]. He wasn’t conscious. He lay there, and then he — what is the word? Seized? He seized up.”
I didn’t say anything. I was thinking, There’s no way to talk about death without repeating words you’ve already heard on TV. In death everybody sounds like dialogue from E.R.
“Then he voided,” [Ava] continued, still being official. “Pissed himself, shit on himself. His body kind of arched. And there was the smell. Then he flattened out, and lay down, and that was it48 .”
Pour dire que David est mort, les seules options sont soit de répéter des mots maintes et maintes fois entendus, vidés de leur sens car systématiquement utilisés lors d'un décès (ce que Courtois appelle le langage des fleurs « en plastique49 »), soit de parler de la dimension corporelle de la mort, certes souvent tue (sauf dans la littérature du SIDA), mais qui ne rend aucune justice à l'absence due au décès. Alors John Weir ne dit pas la mort de David, il invente celle de Zack, ce qui lui permet de faire revivre son ami le temps d'un roman, mais sans écrire sa mort, car ça lui est impossible. Confronté à l'imminence de sa propre mort, Feinberg avait renoncé à son double fictionnel ; vingt ans après la mort de David, « en désespoir de mots50 », Weir lui en crée un autre. C'est par la fiction que David Feinberg et Michael Tolliver survivent ; on ne parle pas des morts, on écrit sur eux ; c'est, selon Philippe Ariès, l'une des caractéristiques de notre temps :
Si la littérature a continué son discours sur la mort, […] les hommes quelconques sont devenus muets, ils se comportent comme si la mort n'existait plus. Le décalage entre la mort livresque qui reste bavarde et la mort réelle, honteuse et taisible, est d'ailleurs l'un des caractères étranges mais significatifs de notre temps51.
Le SIDA et sa littérature sont des lieux privilégiés pour mettre des mots sur ce réel devenu peu à peu indicible qu'est la mort ; le très grand nombre d’œuvres, de tout acabit, que l'on peut qualifier de « littérature du SIDA », notamment celles écrites et/ou publiées avant 1996, indique que de la crise du SIDA a émergé un nouveau discours sur la mort, qui parle de ce que Vovelle appelle la « mort breughélienne52 » en la traitant sur le mode de l'humour, un humour souvent déconcertant, toujours incisif, sans concession :
In an absurd world, humor may be the only appropriate response. […] Humor is a survival tactic, a defense mechanism, a way of lessening the horror. I would probably literally go mad if I tried to deal with AIDS at face value, without the filter of humor53.
C'est ce traitement si particulier du thème de la mort que Tony Kushner décrit dans la préface de Queer and Loathing :
David Feinberg […] produced work that holds its audience excruciatingly on the razor's edge between comedy and horror. Feinberg makes you laugh from precisely the place inside of you where laughter really hurts. (ix)
S'il y a un « avant » et un « après » dont le point de rupture est le SIDA, c'est probablement celui-ci ; et s'il existe d'autres écritures de la maladie ou de la catastrophe, c'est bien l'écriture du SIDA qui est à l'origine d'un renouveau dans le discours sur la mort. Dans nos sociétés où la mort est peu à peu devenue taboue, les mots du SIDA sont ceux qui amènent le lecteur à s'y confronter pleinement, sans détour — c'est tout l'enjeu de ce qui perdurera de la littérature du SIDA des premières années :
Si l’on est, comme dit Pierre Merle, dans une « société de consommation du mot », le langage de la mort restera le langage des fleurs… en plastique. Le seul lieu d’où pourra naître une parole pleine, si on veut bien l’entendre, sera peut-être l’hôpital, qui a pourtant tout fait depuis environ un siècle pour qu’on en parle plus. Les efforts entrepris pour accompagner les mourants et les écouter vont dans ce sens. Et la mobilisation des malades du Sida et de leurs soignants, secondés par des psychanalystes, leur volonté de penser et de parler, pourraient répondre à cette nouvelle donne dans l’histoire de la mort par la réinvention d’un langage vivant. De ceux qui veulent la mort à soi que Rilke réclamait déjà au début du siècle, contre la « mort en série », préfabriquée, conventionnelle, viendront peut-être des mots à soi dont l’authenticité pourra faire les mots de tous54.
Ariès, Philippe. Essais sur l’histoire de la mort en Occident. Paris : Seuil, 1975.
Armstrong, Elizabeth A., et Suzanna M. Crage. “Movements and Memory: The Making of the Stonewall Myth”. American Sociological Review 71-5 (2006) : 724-751. American Sociological Association.
Balutet, Nicolas, dir. Ecrire le SIDA. Lyon : André, 2010.
Benson, Heidi. “Armistead Maupin takes new trip down Barbary Lane”. San Francisco Gate 11 June 2007: n. pag. San Francisco Gate. Web. Accessed 04/08/13.
Burkett, Elinor. The Gravest Show on Earth: America in the Age of AIDS. New York : Houghton, 1995.
Callen, Michael. Surviving AIDS. New York : Harper, 1990.
Courtois, Martine. Les Mots de la mort. Paris : Belin, 1991.
Feinberg, David. Eighty-Sixed. New York : Penguin, 1989.
Feinberg, David. Spontaneous Combustion. New York : Penguin, 1991.
Feinberg, David. Queer and Loathing. Rants and Raves of a Raging AIDS Clone. New York : Penguin, 1994.
Gale, Patrick. Armistead Maupin. Bath : Absolute, 1999.
Gardey, André-Michel. “Hervé Guibert : de l'impudeur au réel de l'image Sida et réflexion psychanalytique sur le corps”. Cliniques méditerranéennes 64 (2001) : 253-259.
Kramer, Larry. Reports from the Holocaust. The Making of an AIDS Activist. New York : Penguin, 1990.
Kushner, Tony. Angels in America. New York : Theatre Communications Group, 1995.
Koval, Ramona. Interview of Armistead Maupin. Brisbane Writers' Festival. ABC Radio National, 2007.
Maupin, Armistead. Further Tales of the City. New York : Harper, 1982.
Maupin, Armistead. Significant Others. New York : Harper, 1987.
Maupin, Armistead. Sure of You. New York : Harper, 1989.
Maupin, Armistead. Michael Tolliver Lives. New York : Harper, 2007.
Monette, Paul. Borrowed Time: An AIDS Memoir. New York : Avon, 1988.
U.S. Department of Health and Human Services. Surgeon General’s Report on Acquired Immune Deficiency Syndrome. Washington : GPO, 1986.
Texier, Catherine. “When Sex Was All that Mattered”. Rev. Of Eighty-Sixed. The New York Times 26 February 1989: n. pag.
Vovelle, Michel. Mourir autrefois. Paris : Gallimard, 1974.
Weir, John. What I Did Wrong. New York : Viking, 2006.
1 D. Feinberg, Eighty-Sixed, 152.
2 L. Kramer, Reports from the Holocaust: The Making of an AIDS Activist, 1.
3 M. Callen, Surviving AIDS, 63.
4 D. Feinberg, Spontaneous Combustion, 151.
5 Surgeon General’s Report on Acquired Immune Deficiency Syndrome, 12 (je souligne).
6 L'utilisation de « their » est également à noter ; il ne s'agit pas de « la » maladie ou de « cette » maladie, mais de « leur » maladie. Dans cette brochure, le « Surgeon General » semble vouloir résoudre la quadrature du cercle : rassurer le grand public (en insistant notamment sur l'absence de risque de transmission du virus lors d'interactions sociales) tout en l'alertant sur le nombre croissant de cas dans la population hétérosexuelle, d'où certaines tournures pour le moins paradoxales.
7 « [In 1995] the average gay man with HIV lives 39 months after his diagnosis with full-blown AIDS. » (E. Burkett, The Gravest Show on Earth, 192).
8 D. Feinberg, Spontaneous Combustion, 77.
9 A. Maupin, Sure of You, 175.
10 D. Feinberg, Queer and Loathing 133.
11 Ibid., 139.
12 T. Kushner, Angels in America, 174 .
13 C. Texier, “When Sex Was All that Mattered”, 2.
14 N. Balutet, Écrire le sida, 63.
15 D. Feinberg, Spontaneous Combustion 8.
16 D. Feinberg, Significant Others 189.
17 M. Courtois, Les Mots de la mort, 262.
18 Dans une interview, Maupin dit: « [P]eople used to say to me, “Thank God you stopped writing Tales of the City because Michael would be dead by now.” And I fully thought when I entered the series in 1989 (just as I thought this about every friend I had who was HIV positive) that he only had a few months or maybe years to go. » (R. Koval, Interview of Armistead Maupin, 3).
19 Maupin a même annoncé sur Twitter en 2011 qu'il avait commencé à travailler sur le tome suivant, The Days of Anna Madrigal.
20 “The world is changing way too fast for me with its Podcasts and pregnant strippers and macho manginas. No sooner have I mastered one set of directions than another comes along to replace it. It’s getting harder and harder to keep up with what’s going down.” (Michael Tolliver Lives 164-165).
21 A. Maupin, Michael Tolliver Lives, 187.
22 Ibid., 5.
23 A. Maupin, Further Tales of the City, 3.
24 Ibid., 334.
25 Ibid., i.
26 A. Maupin, Michael Tolliver Lives, 12-13.
27 Les quatre premiers tomes des Tales of the City ont d'abord été publiés dans le San Francisco Chronicle et le cinquième, bien qu'écrit comme un roman, a été publié de façon morcelée dans le San Francisco Examiner ; le dernier tome de l’hexalogie originelle, Sure of You, est le premier à n'avoir été publié que sous la forme livresque ; c'est bien sûr aussi le cas des tomes « contemporains » (de 2007 et 2010).
28 R. Koval, op.cit., 4.
29 « After 18 years, Maupin has returned to Barbary Lane with a new book — Michael Tolliver Lives, out Tuesday from HarperCollins — which is another love song to Maupin's adopted home. Tuesday, the city returns the compliment; Mayor Gavin Newsom has declared June 12 “Michael Tolliver Day in San Francisco” » (H. Benson, “Armistead Maupin Takes New Trip down Barbary Lane”, 1).
30 E. Armstrong, “Movements and Memory: The Making of the Stonewall Myth”, 743. Maupin lui-même abonde dans ce sens: “Nobody heard about Stonewall, let's face it. That was a PR campaign after the fact…” (P. Gale, Armistead Maupin, 31).
31 A. Maupin, Michael Tolliver Lives, 4.
32 Ibid., 19.
33 D. Feinberg, Queer and Loathing, xi.
34 La citation au début de cet article, « By the time you read these words I may in all likelihood be dead », date de 1989 ; or il était encore en vie pour la publication de Queer and Loathing en 1994.
35 D. Feinberg, Queer and Loathing, 244.
36 « David B. Feinberg, Papers 1976-1994. » The New York Public Library, Humanities and Social Sciences Library, Manuscripts and Archives Division.
37 P. Monette, Borrowed Time: An AIDS Memoir, 1.
38 D. Feinberg, Queer and Loathing, 135.
39 Ibid.
40 Ibid., 69.
41 Ibid., 135.
42 Un cathéter de Hickman est un cathéter permanent implanté dans une voie veineuse centrale permettant l'administration régulière de médicaments ; dans ce contexte, selon toute vraisemblance, Feinberg l'envisage en vue de traiter un cytomégalovirus.
43 J. Weir, What I Did Wrong, 27.
44 Ibid., 28.
45 Ibid., 45.
46 Ibid., 121.
47 M. Vovelle, Mourir autrefois, 11.
48 J. Weir, What I Did Wrong, 203.
49 M. Coutois, Les Mots de la mort, 357.
50 A. M. Gardey, “Hervé Guibert : de l'impudeur au réel de l'image sida et réflexion psychanalytique sur le corps”, 259.
51 P. Ariès, Essais sur l’histoire de la mort en Occident, 165.
52 « [La] mort breughélienne qui a pour nom la famine, la peste ou la guerre... » (M. Vovelle, Mourir autrefois, 31)
53 D. Feinberg, Queer and Loathing, 87.
54 M. Courtois, Les Mots de la mort, 357.